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Création du STRASS : Les TravailleurSEs du sexe s’auto-organisent et reprennent la parole
Le vendredi 20 mars 2009 aura vu naître un nouveau syndicat en France...
Le vendredi 20 mars 2009 aura vu naître un nouveau syndicat en France...
Loin des vieilles organisations de type ouvriériste classiques chez nous, il s’agit d’un syndicat autogéré... le STRASS, autrement dit le Syndicat du TRAvail Sexuel.
C’est lors des récentes Assises européennes de la prostitution de 2009 qu'il fut inauguré, en présence de nombreuses délégations d’associations de défense des droits des travailleurSEs du sexe du monde entier (Espagne, Belgique, Suisse, Italie, Egypte, Canada, Mexique...) venues apporter leur soutien et témoigner de leurs conditions d’exercice et expériences diverses face à la répression.
Pour fournir au STRASS de solides bases revendicationnelles, des débats de qualité eurent lieu en atelier toute la matinée.
Entre autres sujets, fut abordée la place des putes dans la prévention face aux IST et pratiques à risque, dans laquelle elles jouent un rôle de première place et affirment faire partie de la solution.
Un autre atelier était consacré aux revendications des "putes" en termes de droits sociaux, notamment dans le nouveau contexte induit par la LSI de 2003 (Loi Sarkozy, "Loi réprimant le racolage passif") qui sous couvert de lutte contre le proxénétisme et la traite, ne vise que des objectifs de lutte contre l‘immigration, et accentue au contraire les risques courus par les prostituéEs en les criminalisant directement ou indirectement (c’est-à-dire au travers des clients), tant au niveau sanitaire, des violences (des policiers ou clients) que des réseaux de proxénétisme et d‘esclavage humain.
-Le débat autour du statut à reconnaître aux prostituéEs déboucha par un assez large consensus sur celui de travailleurSEs indépendantEs, pour que la loi empêche toute exploitation de leur travail par proxénetisme ou salariat, tout en reconnaissant leur profession, pour laquelle elles côtisent déjà auprès de l’URSSAF, mais en contre-partie de quoi elles ne perçoivent que très peu de prestations sociales (retraites dérisoires, couverture sociale...), ce qui ne peut que les rendre plus précaires et fragiles encore.
-Fut aussi abordé le problème des conjoints masculins de prostituéEs, qui, s’ils vivent sous le même toît et ne peuvent justifier de revenus, peuvent être inculpés de proxénétisme de soutien, l‘inverse étant impossible.
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Le dernier atelier, portant sur l’organisation voulue par et pour les sex workers, vint clore des mois de travail et collaboration entre magistrats, juristes et associations de professionnelLEs du sexe pour contourner la loi contre le racolage passif et créer les statuts du premier syndicat de travailleurSEs du sexe en France, où la prostitution n’est pas officiellement interdite.
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Ce syndicat, qui en deux jours d’existence compte déjà plus de deux cent adhérentEs et plusieurs fédérations en France ainsi qu’à l’étranger, a été véritablement conçu comme un outil au service de l’auto-organisation des sex workers. Il devrait leur permettre de reprendre la parole dans le débat public sur la prostitution, depuis trop longtemps accaparé par les "experts" (médecins, catholiques, abolitionnistes...) parlant à leur place, et ainsi les aider à lutter contre l’opprobre morale à l’encontre de leurs activités qui les place soit dans le rôle de victimes, soit comme modèle repoussoir pour toute femme respectable...
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Enfin le STRASS a été créé comme un outil de plus contre le proxénétisme, l’esclavage et la traite des êtres humains ainsi que l’exploitation sexuelle des enfants, en tant que lieu de réflexion et d’élaboration d’une prostitution autogérée et choisie. La piste de la création de coopératives composées de travailleurSEs s’associant librement a d’ailleurs été sérieusement soulevée.
L’auto-organisation généralisée de la société commencera-t-elle par le travail du sexe?
Nathou
(* article extrait du dernier Rouge & Vert)