samedi 31 mai 2008

Tribune des Collectifs Unitaires dans Rouge

Pour débattre de la question de la construction d’un nouveau parti, « Rouge » ouvre ses colonnes à des individus, courants ou organisations politiques. Nous publions ici le point de vue des Collectifs unitaires pour une alternative au libéralisme (Cual).


Oui, il faut du neuf.
Nombre de vos déclarations l’affirment : la LCR n’est « plus l’outil politique le plus adapté à la situation actuelle ». Olivier Besancenot en fait sa campagne d’explication sur la nécessité d’un nouveau parti anticapitaliste (NPA) : « Beaucoup de gens étaient dans la résistance [au gouvernement] mais se sentaient orphelins d’une structure de réplique globale. » Notre coordination de collectifs unitaires pour une alternative au libéralisme s’adressait ainsi au dernier congrès de la LCR : « Un autre avenir est possible, si nous le voulons. Cette alternative ne peut venir que des forces convaincues de cette nécessité. Nous voulons contribuer à construire une grande force politique nouvelle avec celles et ceux qui pensent qu’une autre façon de vivre ensemble est possible […]. Où tou-tes puissent se retrouver, dans la diversité de leurs expériences, de leurs engagements, de leurs luttes. Cette diversité n’est pas un obstacle mais, au contraire, une formidable richesse si la volonté de travailler ensemble l’emporte sur celle d’imposer le point de vue de sa sensibilité, de son parti, de sa philosophie.

« Ce mouvement doit s’appuyer sur un projet politique pouvant recueillir un large soutien populaire. C’est la garantie de ne pas reproduire les erreurs des gouvernements de gauche à majorité socialiste, qui n’ont jamais remis en cause les intérêts des forces économiques et financières dominantes. »

Comme vous, nous refusons cette société de plus en plus inégalitaire, sécuritaire, régressive. Comme vous, nous voulons un monde solidaire, fondé sur le partage des richesses, l’égalité sociale, l’impératifécologique, la paix et la démocratie généralisée. Nos assises, tenues en décembre dernier, ont proposé à toutes les forces sociales, politiques, associatives, syndicales, qui s’opposent au libéralisme, de s’engager ensemble dans la construction d’un projet émancipateur qui allie justice sociale et écologie, démocratie et égalité, solidarité et liberté, féminisme, antiracisme, pacifisme, réponses concrètes pour demain et projets d’avenir.

Dans cette perspective, nous pensons nécessaire de créer un cadre qui permette d’agir immédiatement en commun, tout en poursuivant les débats qui nous traversent. Tant sur le projet de transformation sociale et écologique à défendre que sur la stratégie et les moyens à mettre en œuvre pour y parvenir (formes d’organisation, rapports aux institutions, alliances, place et rôle des mouvements sociaux…).

D’où notre proposition de préparer et de réaliser unitairement, dès 2008, des états généraux de toutes les forces, groupes de militants, réseaux de mobilisation, courants, partis, qui refusent que la gauche continue d’être dominée par le social-libéralisme. Il s’agit, dans un premier temps, de créer un cadre d’action, de réflexion et d’expression politique laissant subsister, autant qu’ils le souhaitent, les divers courants, tant que l’expérience ne les conduit pas à fusionner ou à se dépasser. Un cadre inscrit dans la durée, fondé sur des engagements communs dès maintenant et, à terme, un rassemblement politique.

Vous nous avez, pour le moment, répondu par la négative : pour vous, rien n’est plus urgent que la constitution des comités d’initiative du NPA. Nous regrettons vivement cette réponse. Le NPA que vous vous proposez de construire sera sans aucun doute un élargissement de l’actuelle LCR, il représentera sans doute également une certaine ouverture par rapport à la tradition politique dont vous êtes issus. Nous nous réjouirions que ce soit effectivement le cas. Mais ce projet n’est pas à la hauteur des enjeux auxquels nous sommes confrontés.

Notre conviction est qu’il y a plus que jamais urgence à regrouper les forces et les courants de la gauche de transformation sociale et écologique pour offrir ensemble une alternative au bipartisme tracé par la droite et le social-libéralisme. De ce point de vue, sans attendre, les prochaines élections au Parlement européen sont un rendez-vous à ne pas manquer : elles nous donnent l’occasion de manifester notre volonté de peser sur la situation et de ne pas laisser le terrain à gauche au social-libéralisme ou aux opérations d’enfumage, comme celle proposée par Cohn-Bendit sous couvert de rassemblement de tous les écologistes. Ce serait le meilleur complément à notre engagement commun dans les luttes. La LCR, et demain le NPA s’il voit le jour, a toute sa place à y prendre.

La coordination nationale des Cual


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RÉPONSE DE LA LCR AUX COLLECTIFS ANTILIBÉRAUX

Avec ou sans le PS, il faut choisir. La contribution de la Coordination des collectifs unitaires pour une alternative au libéralisme, parue dans Rouge la semaine dernière, met en évidence de nombreuses convergences avec les préoccupations de la LCR. Elle fait aussi apparaître des points de discussion voire de désaccord, sur les initiatives politiques à prendre. Illustration manquante

L’ampleur et la violence des attaques menées par Sarkozy et son gouvernement ne font sûrement pas débat entre nous. L’effet des contre-réformes menées peut remodeler la société française et modifier les rapports de force en faveur des classes possédantes. Cela rend plus urgent que jamais l’émergence d’une force anticapitaliste. À attaque globale, réponse globale. Le désaccord entre nous n’est donc pas sur la nécessité d’une telle force, mais sur la possibilité de la réaliser dès maintenant et sur les délimitations qui la définissent.

Dans votre tribune, vous regrettez que nous ne nous inscrivions pas dans le projet que vous portez d’états généraux afin, « dans un premier temps, de créer un cadre d’action, de réflexion et d’expression politique ». Pour notre part, nous pensons qu’il est possible de commencer à construire d’ores et déjà ce nouveau parti. De ce point de vue, il est dommage que vous n’ayez pas rappelé votre décision et vos raisons de ne pas vous engager dans le processus du nouveau parti anticapitaliste (NPA), comme nous vous l’avions proposé lors de notre dernière réunion commune.

Ainsi, la motion adoptée à votre réunion des 29 et 30 mars indique, entre autres, que « les collectifs n’ont pas vocation à être, en tant que tels, partie prenante de la construction du NPA ». Vous écrivez : « Le projet de NPA, déjà lancé, ne correspond pas à notre démarche unitaire et de rassemblement, telle qu’elle a été définie lors de nos assises ». Plusieurs centaines de collectifs pour un nouveau parti, leur composition, le nombre de militants regroupés démontrent qu’il est temps d’avancer concrètement sur ce terrain. Les forces militantes déjà accumulées dessinent les contours d’une organisation qui ne sera pas simplement un « élargissement de l’actuelle LCR ». À cela, ajoutons que la radicalité sociale qui s’exprime dans ce pays ne peut se réduire à la réorganisation de ce qui existe. C’est le sens de notre formule, changer de gauche et non changer la gauche.

Ce n’est guère une nouveauté, mais parce que nous voulons construire un parti de rupture avec l’ordre existant, l’indépendance vis-à-vis du PS est une question essentielle. Le récent désastre italien, qui a vu le Parti de la refondation communiste (PRC) se faire laminer après son soutien au gouvernement Prodi, est venu conforter notre orientation de stricte démarcation par rapport à ce parti. Cette orientation n’est pas partagée par tous les partenaires que vous envisagez pour vos états généraux. C’est évidemment le cas du Parti communiste, qui a conclu des accords avec le PS, dès le premier tour, dans la plupart des municipalités.

À ces mêmes élections, si nous avons pu conclure de nombreux accords avec des collectifs antilibéraux, nous devons aussi constater que cette question de l’indépendance par rapport au PS demeure une question ouverte en votre sein. En témoignent les alliances, dès le premier tour, avec le PS, y compris dans de grandes villes comme Aix-en-Provence. Il en est de même pour certains courants politiques investis dans les collectifs : ainsi, à Nantes, la section locale des Alternatifs s’est retrouvée au premier tour sur la liste du Parti socialiste conduite par… le député-maire Jean-Marc Ayrault, dont on ne peut pas dire qu’il est à la gauche du Parti socialiste.

À la fin de votre contribution, vous évoquez les élections européennes de 2009. Pour notre part, nous aborderons cette élection avec une volonté d’ouverture, mais dans la clarté et la cohérence sur le fond politique. Il existe parfois, dans certains secteurs de la gauche antilibérale, un syndrome des années paires et impaires : années impaires, rassemblement antilibéraux, démarcation en paroles vis-à-vis du PS ; années paires, le temps des élus et des listes dès le premier tour avec ce même PS. Le calendrier électoral, souvent redoutable, est ainsi fait : les européennes de 2009 s’inscrivent entre les municipales de cette année et les élections régionales de 2010. On ne peut combattre le projet de construction européenne défendu par le Parti socialiste et gérer loyalement villes et régions avec ce même parti.

Léonce Aguirre et Guillaume Liégard

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